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Les entreprises ont de plus en plus de mal à trouver « candidat à leur pied » !

La relation entre recruteurs et candidats a changé : aujourd’hui ce sont souvent les talents qui choisissent leur future entreprise, et plus l’inverse ! Pour ce faire, ils cherchent un maximum d’informations en amont sur l’organisme qu’ils convoitent.

Pour les entreprises qui prennent la parole à travers des contenus qui vont attirer à elle les meilleurs talents : banco ! Pour les autres, il sera beaucoup plus compliqué de sortir du lot… c’est tout l’enjeu de l’inbound recruiting, LA nouvelle méthode de marketing RH qui est sur toutes les lèvres.

Pour en parler, j’ai interviewé Anaïs Le Digarcher.

Formatrice freelance engagée, Anaïs forme au recrutement pour replacer l’éthique et la bienveillance au cœur des entreprises. Elle accompagne également des particuliers dans leurs projets de reconversion.

Anaïs Ledigarcher, spécialiste du recrutement éthique et formatrice engagée
Passionnée des ressources humaines, Anaïs Le Digarcher accompagne vers la reconversion professionnelle et forme au recrutement notamment.

Son expérience dans les questions RH, recrutement et formation m’ont donné envie de lui donner la parole sur l’inbound recruiting : une technique marketing appliquée au recrutement, qui utilise la création de contenu pour faire venir à soi les meilleurs candidats, en gagnant du temps et donc de l’argent !

C’est aussi un très bon moyen de valoriser son entreprise, sa marque recruteur ou encore ses équipes. D’autant plus que les candidats sont de plus en plus attentifs au contenu produit par les entreprises, pour les connaître de l’intérieur avant d’y postuler.

Prêts à découvrir tous les secrets de l’inbound recruiting pour en faire votre nouveau canal de recrutement ? C’est parti !

Anaïs, est-ce que tu peux nous expliquer en quoi consiste l’inbound recruiting ?

L’inbound recruiting se trouve dans la lignée de l’inbound marketing, qui consiste à faire venir des clients à soi en créant du contenu utile (des articles sur son blog ou des posts sur les réseaux par exemple), au lieu d’aller les chercher par la prospection (ou outbound marketing).

L’inbound recruiting utilise les mêmes méthodes que l’inbound marketing, mais pour attirer des candidats dans le cadre d’un recrutement.

Je dirais que c’est une méthodologie qui se trouve au croisement des notions de marque employeur et de marketing RH/recrutement.

Est-ce que cela veut dire que les processus de recrutement actuels sont devenus obsolètes ? Ou bien l’inbound recruiting viendrait plutôt en complément du reste ?

Ce sont des techniques complémentaires.

Le recruteur a toujours sa stratégie de sourcing direct classique -qu’il adaptera bien entendu à chaque besoin-, qui va passer par la diffusion d’offres, la chasse de têtes, l’approche directe sur les réseaux sociaux professionnels par exemple, la cooptation, l’utilisation de CVthèques, etc.

Et en parallèle, il va travailler sur une stratégie d’inbound recruiting, qui va consister à produire du contenu pour attirer les candidats. On n’est plus dans une démarche sortante mais entrante.

C’est la complémentarité de ces approches qui est vraiment intéressante.

Quelles sont les différentes étapes pour mettre en place une stratégie d’Inbound recruiting ?

Comme pour l’inbound marketing, la première étape est l’analyse des personas : qui sont les candidats potentiels ? Où peut-on les trouver ? Quels sont leurs comportements, leurs centres d’intérêt, etc.

Ensuite on analyse toutes ces données, et enfin on aligne son contenu sur les attentes observées et on publie là où la cible se trouve.

Le profil candidat doit être clairement et précisément défini. Pour des secteurs très spécifiques comme l’IT (Information Technology) par exemple, on a tout intérêt à connaître au maximum le profil des candidats potentiels, quelles plateformes ils utilisent, leurs centres d’intérêt, etc. D’autant plus que c’est un secteur très concurrentiel : ce sont clairement les candidats qui choisissent leur entreprise, et non l’inverse.

Pour le recruteur, cela implique également de se former un minimum au domaine en question : se former aux codes des talents, collecter de l’information, suivre des newsletters spécialisées, bref s’immerger dans l’univers du candidat. Cela peut être se former au code pour quelqu’un qui recrute des profils développeurs par exemple.

À mon sens, c’est une étape indispensable pour pouvoir ensuite créer du contenu qui intéresse le profil de candidats défini au préalable. Parler leur langage est un préalable indispensable.

Comment cela se traduit-il pour les recruteurs, concrètement, en termes de communication ?

Concrètement, ce sont les professionnels des RH et du recrutement qui prennent la parole sur des réseaux comme LinkedIn.

Au-delà de l’aspect technique, ce qui est intéressant c’est de voir que les recruteurs prennent une posture de conseiller : à travers leurs publications, ils partagent des conseils pour les candidats, les soutiennent. C’est quelque chose qu’on voit de plus en plus sur LinkedIn, même si ça reste à mon sens encore trop limité à quelques entreprises.

C’est vraiment une posture de partage, une approche plus humaine, une autre façon de considérer le candidat. Cela vient en complément de l’expérience candidat dont on parle énormément, et cela l’enrichit !

C’est à la portée de tous les recruteurs, et cela apporte un vrai plus à l’entreprise !

Pour donner quelques exemples de personnes qui ont mis en place l’inbound recruiting :

  • Il y a Isabelle BIZE, Chargée de recrutement IT chez WEB ATRIO. Elle n’a pas peur d’avoir des postures tranchées et d’aborder des sujets parfois clivants. Et je crois que c’est ça aussi qui plaît. Elle partage ses coups de gueule, son quotidien de recruteuse, sans langue de bois.
Isabelle Bize, recruteuse chez Web Atrio
Les prises de parole d’Isabelle Bize sur le recrutement et l’univers de l’entreprise en font l’un des fers de lance de l’inbound recruiting.

  • Rassam Yaghmaei, recruteur IT chez Doctolib. Il a lancé sa chaîne Twitch où il organise des lives toutes les semaines. Il invite d’autres recruteurs pour échanger sur des sujets liés au recrutement tech. Sur Twitch comme sur LinkedIn, il a un ton très naturel et il utilise beaucoup l’humour ! Une spontanéité qui plaît !
Rassam Yaghmaei, recruteur tech chez Doctolib
Rassam Yagmaé, recruteur chez Doctolib : un ton naturel et léger qui rassemble
  • Camille Goni, Head of Talent Acquisition chez Shine. Elle prend des positions intéressantes, par exemple sur les tests de personnalité. Avoir et exprimer des points de vue divergents lui permet de se démarquer et d’alimenter les débats autour de questions qui concernent les candidats.
Camille Goni, recruteuse chez Shine
Camille Goni, Head of Talent Acquisition chez Shine : des prises de position tranchées, qui font avancer la réflexion en matière de recrutement.

Leur point commun est de sortir du rôle de recruteur stricto sensu, pour se tourner davantage vers un rôle de conseiller pour les candidats. Ce sont aussi des sources d’inspiration pour les autres entreprises.

Quels sont les bénéfices de l’inbound recruiting ?

J’y vois à la fois un intérêt pour la profession ET pour les candidats.

Pour les candidats, cela permet de bénéficier d’informations intéressantes, sur le recrutement en général ou sur l’entreprise en question, l’ambiance au travail, la confiance accordée aux salariés, les possibilités d’évolution, la politique de formation, etc.

Et côté recruteur, c’est une opportunité de revaloriser l’image de cette profession : les candidats prennent conscience qu’ils sont face à des humains. Les DRH ont souvent une image plutôt dévalorisée, terne. On les imagine froids, distants. A travers leurs prises de parole et leur création de contenus, les recruteurs cités plus hauts participent à modifier cette image : on voit qu’ils sont proches des candidats, plus accessibles aussi, dans une approche humaine.

Et pour l’entreprise bien sûr, l’intérêt c’est de se distinguer auprès des candidats ! Elles ont donc tout intérêt à encourager voire impulser ce type de démarche.

De quelle façon l’inbound recruiting rejoint-il la marque employeur ?

La marque employeur, c’est l’image que l’entreprise renvoie dans sa manière de traiter ses employés et qui va transparaître dans sa stratégie d’attraction des candidats.

Alors que la marque recruteur est « individu dépendant » : c’est le recruteur, individuellement, indépendamment de l’entreprise, qui va travailler son image recruteur. C’est une décision personnelle, même si cela joue aussi sur l’image de l’entreprise.

Est-ce que l’inbound recruiting permet aussi de fidéliser les salariés en place ?

L’inbound recruiting peut effectivement jouer sur la fidélisation des salariés.

Concrètement, cela peut se traduire par des vidéos sur le site carrière par exemple : des collaborateurs peuvent parler de leur métier, expliquer leur quotidien. A travers ce type d’initiative, on mobilise les équipes, on les fait témoigner sur comment elles se sentent dans l’entreprise.

Donc ça peut être un levier de fidélisation, à condition que les salariés soient inclus dans cette stratégie.

Le site carrière est souvent réservé aux grands groupes, est-ce que l’inbound recruiting est aussi à la portée de + petites entreprises (TPE/PME) ?

Oui, aujourd’hui il y a d’autres moyens de mettre en avant ses offres, avec des sites comme Welcome to the jungle ou encore en communiquant sur les réseaux sociaux.

L’inbound recruiting peut aussi jouer sur la façon de rédiger les offres d’emploi, en réfléchissant prioritairement à la cible en amont : comment va-t-on s’adresser à elle ? Qu’est-ce qui va l’intéresser ? De quelles informations a-t-elle besoin dans l’offre ? etc.

On retrouve ce même principe, en amont de la rédaction de l’offre : toujours se placer du point de vue des cibles pour juger de la pertinence du contenu, quels sont ses besoins, ses attentes, et y répondre à travers l’offre. A l’inverse, une offre très classique passera inaperçue parce qu’elle ne donnera pas envie de postuler.

Est-ce qu’il y a des pré-requis avant de mettre en place l’inbound recruiting ? (une culture d’entreprise déjà bien établie ? Avoir fait un travail sur son identité de marque, sa marque employeur…).

Avant même de réfléchir à sa marque employeur, l’idée c’est vraiment de diffuser des choses en cohérence avec ce qui se passe dans l’entreprise. Donc on va d’abord examiner ce qui existe en interne : où en est-on en termes de stratégie RH ? de bien-être des salariés ? On va se poser très concrètement sur ces questions.

Donc il y a effectivement un travail à faire en profondeur avant de se poser la question de l’image, de la marque employeur, etc. La marque employeur va naturellement découler des actions concrètes qui auront été mises en place en interne.

Les bases doivent être là avant de communiquer, c’est vraiment essentiel ! Dans le cas inverse, la communication ne donnera rien de bon. C’est l’exemple typique de l’entreprise qui « vend » un baby-foot dans ses offres d’emploi, et une fois là-bas on se rend compte que l’ambiance est toxique, qu’il y a des pratiques pas claires, etc.

On ne peut pas entreprendre une démarche d’inbound recruiting si on n’a pas d’abord analysé ses pratiques RH et si on n’a pas fait une introspection sur son entreprise. Mettre à plat ses pratiques et sa culture d’entreprise avant de communiquer est incontournable. C’est ce qui va permettre de dégager des axes de communication pour l’inbound recruiting.

D’ailleurs, dans les entreprises où il n’y a pas cette cohérence, ça ne fonctionne pas : les gens partent très rapidement…

Est-ce que tu as des exemples d’entreprises qui sont figures de proue de l’inbound recruiting ?

Je peux citer Shine et Doctolib, dont on a parlé précédemment, mais aussi Danone ou encore Deloitte.

Pour Deloitte par exemple, quand le candidat arrive sur le site carrière, il a déjà l’impression de faire partie de l’entreprise : pour une offre d’emploi sur un poste de commercial par exemple, on va être totalement immergé dans le process d’intégration, avec vidéo d’un commercial qui explique son cadre de travail, de quoi sont faites ses journées, ce qui lui plaît dans son poste, les relations qu’il a au quotidien avec ses collègues ou en externe, etc.

Autre exemple : Shine communique sa grille de salaires sur son site carrière, ce qui est un argument fort pour l’attraction candidat. C’est également révélateur de l’état d’esprit de l’entreprise, de l’envie de transparence, de respect mutuel, etc. En plus, leur site carrière est bien construit, dynamique, fun… autant d’éléments qui donnent envie de postuler !

En conclusion :

On voit que les candidats et les lecteurs d’une façon générale sont de plus en plus friands de contenus concernant les entreprises : découvrir leurs coulisses, la vie d’entreprise et des équipes au quotidien, tenter de sentir l’ambiance qui s’en dégage, découvrir les engagements de la marque, etc. C’est tout cela qui fait qu’un internaute va se sentir proche d’une marque !

Concernant l’inbound recruiting plus précisément, nous avons vu qu’une bonne partie de cette technique repose sur la capacité, l’envie et la possibilité des recruteurs à s’exprimer sur leur quotidien, leurs enjeux et ceux des candidats.

Un fait qui n’est possible qu’avec une confiance totale du dirigeant pour ses équipes de recrutement, voire sa capacité à les encourager dans cette voie. Un facteur qui est d’ailleurs déjà révélateur de l’ambiance qui peut régner dans une entreprise, et des conditions de travail.

Qu’en pensez-vous ? Vous connaissiez l’inbound recruiting ?

Vous pouvez retrouver Anaïs sur Instagram : https://www.instagram.com/anaisledigarcher/

Et sur LinkedIn : https://www.linkedin.com/in/anais-le-digarcher/